En
1871, la France s'interroge sur elle même et sur son destin. Le
nouveau gouvernement va s'efforcer de transformer cette force populaire
en un nationalisme d'état dûment contrôlé,
dans une opération de régénération morale
sans précédent dans l'histoire du pays. La III°
république va ainsi forger ses propres mythes et se transformer
en mécène. Dans ce cadre, le réalisme
académique sera exploité au maximum, et les peintres
militaires auront une véritable mission patriotique, les
victoires comme les défaites leur offrant un inépuisable
répertoire, de Vercingétorix aux mobiles de
l'année terrible (1870-71).
La III°
république peut être considéré comme l'age
d'or de la peinture militaire. Le succés de peintres militaires
comme Edouard Détaille ou Alphonse de Neuville, tant en France
qu'à l'étranger, en témoigne. La peinture
commémorant la guerre de 1870 abonde et connait un vif
succés dans les années 1880, dans cette France où
l'humiliation de la défaite et de la perte de l'Alsace-Lorraine
hante la conscience nationale. Les peintres de cette
génération qui ont, de plus, souvent pris part aux
combats, rompent avec la peinture traditionnelle de batailles et
proposent une autre vision de la guerre, plus réaliste, plus
anecdotique mais aussi plus politique. Ils contribuent à forger
l'image héroïque du combattant français,
malgré la défaite finale.
Alphonse Marie Adolphe De Neuville (1836-1885): Peintre militaire français, ancien combattant de la guerre de 1870, élève
d'Eugène Delacroix. Parmi ses sujets, on trouve la guerre de
crimée, la guerre franco-prussienne, la guerre anglo-zouloue.
Son oeuvre la plus célébre reste les dernières cartouches, relatant un épisode de la guerre franco-prussienne:

La charge héroïque des lanciers de Reichoffen:
la bataille du cimetière Saint-Privat - musée des invalides:
Défense de la porte de Longboyau - chateau de Buzenval - 21 octobre 1870 - musée des invalides:

Capitaine de dragons (1878) - musée des invalides:

Jean Baptiste Edouard Détaille (1848-1912): Peintre militaire français, ancien combattant de la guerre de 1870, élève d'Ernest Meissonnier. Lorsqu'éclata
la guerre de 1870, Détaille s'engagea au 8e bataillon
d'infanterie mobile
et, en novembre 1870, se trouva attaché à
l'état-major du général Ducrot et participa aux
combats aux environs de Paris. Il put observer les
régiments dans le feu de l'action sur la Marne. Cette
expérience
devait le marquer profondément et inspirer certaines de ses
meilleures toiles comme Salut aux Blessés (1877), La
défense de Champigny (1879), Le soir de Rezonville. Avec Alphonse de Neuville,
il produisit deux grands panoramas des batailles de Champigny
et de Rezonville, qui furent ensuite découpés et vendus
aux enchères, avec un franc succés. La peinture de
Detaille se rattache au réalisme et au
naturalisme. Detaille peignait lentement et de manière
méthodique,
de façon à produire des œuvres aussi
réalistes et précises que
possible.
Le rêve - 1888 - musée d'Orsay:

Les panoramas:
Il s'agissait de peintures circulaires présentées dans
une rotonde de façon que le spectateur, au centre, ait une
illusion optique la plus complète possible. Voulant
recréer en quelque sorte le mouvement, on peut le
considérer comme l'ancêtre du cinéma. Ils firent
fureur durant tout le XIX° siècle, avant de disparaitre,
vers 1910. Il n'en reste que quelques spécimens, les autres
ayant été détruits, ou revendus comme fragments.
Le panorama français, construit par Garnier en 1880. Il se trouvait au 251 rue Saint-Honoré:

Fragments des panoramas des batailles de Champigny et de Rezonville:
le panorama de champigny a été ouvert en mai 1882
à Paris, Celui de rezonville en 1883 à Vienne, avant de
revenir en France en 1887. La panorama de champigny a été
ensuite découpé en 65 fragments destinés à
la vente, celui de rezonvile en 115 fragments.
Fragment du panorama de la bataille de Champigny (30 novembre, 1er et 2 decembre 1870) - musée de Grenoble:

Fragment de la bataille de Champigny - Le fond de la giberne - musée des invalides:

Fragment
de la bataille de Rezonville (16 aout 1870) - Capitaine
d'état-major interrogeant des prisonniers allemands- musée des invalides:

Fragment de la bataille de Rezonville (16 aout 1870) - Lignard et chasseur à pied hors de combat - musée des invalides:

Ernest Meisonnier (1815-1891):
surtout
connu pour ses peintures de l'épopée
napoléonnienne,symbole le plus accompli de l'art
académique, il peignit aussi quelque tableaux sur les campagnes
du second empire et le conflit
franco-prussien.
Le siège de Paris:

Pierre-Georges Jeanniot (1848-1934):
il sort de Saint-Cyr en 1866 et sert comme sous lieutenant au 23e de
ligne quand il est blessé et fait prisonnier à
Rezonville. Il démissionne en 1883 pour se consacrer à sa
carrière artistique, notamment à L'Illustration. Il
rencontre Manet et entre en relation avec Degas. Parmi les
peintres militaires, il occupe une place à part en
s'intéressant aux anecdotes et aux détails de la
vie militaire en temps de paix.
Les réservistes - 1882:

Maurice Denis:
La foi, l'espèrance et la charité - (tableau réalisé aprés la guerre, musée national des deux victoires):

René Rousseau-Decelle:
La bataille de Mondement - 1914 - (tableau réalisé en 1917):

Instruction artistique des soldats - Supplément illustré du petit journal 27 juillet 1902: on notera l'élégante tenue de sortie encore en usage au début du XX° Siècle
