Il
faut bien se pénétrer de ce que fut cette institution de
la propagande pour comprendre les difficultés que les historiens
de l'avenir auront à surmonter pour écrire l'histoire de
la grande guerre. Je crois qu'en aucun siècle on n'a aussi
ouvertement travesti la réalité que dans la
période que nous venons de vivre. La lutte formidable
engagée entre deux groupes de nations a exigé l'emploi de
tous les moyens d'attaque et de défense. L'arme morale ne
pouvait être négligée. Gagner la sympathie des
neutres, recevoir d'eux l'appui matériel qu'on pouvait en
attendre, tout en les persuadant de les refuser aux adversaires,
réussir enfin à les jeter à leur tour sur
l'ennemi, chacun des groupes alliés donnèrent
respectivement ces divers buts à leur activité. Par un
souci du point de vue du droit, bien étrange dans ce
déchaînement de la force brutale, on s'efforça
d'abord de rejeter sur l'adversaire la honte d'avoir été
l'agresseur. Mais l'intérêt primant le sentiment dans les
décisions des peuples, l'essentiel fut, pour chaque
belligérant, de persuader les neutres qu'il était le plus
fort. De là une action de propagande parallèle et
contradictoire, menée vigoureusement des deux
côtés, dont les neutres restérent longtemps
vacillants et perplexes
...
La propagande intérieure, destinée à entretenir le
moral de la nation, avait dans ses moyens l'admiration sans
réticence ni restriction. Comment donner confiance au pays si
l'on ne lui persuadait que tout allait pour le mieux, que ses chefs
étaient sans défauts, que tout ce qu'on entreprenait
réussisait. La censure venait en aide à la propagande en
tempérant la vivacité des critiques ou en les supprimant.
De là un optimisme officiel, endormeur, des habitudes d'exalter
le mérite au dessus de sa valeur réelle, de masquer le
laid et le médiocre, d'excuser l'erreur, de là une
franmaçonnerie d'indulgence et d'aveuglement propre à
étouffer le sentiment de la vue exacte des choses et à
atrophier le bon sens - Jean de Pierrefeu - Plutarque a menti - 1923 - Les Historiens de la guerre
Avis, placards, affiches, tracts:
Au début du XX° siècle, les avis et placards sont
encore un moyen de communication essentiel utilisé par les
autorités civiles ou militaires. Imprimés en grand
nombre, ils sont affichés dans les lieux publics et les endroits
fréquentés pour y être vu de tous. On pense
naturellement dessuite à l'affiche de mobilisation
générale ou encore à celle de Galièni, mais
ce média fut trés largement utilisé durant toute
la guerre.

Les
affiches quant à elles utilisent l'image comme vecteur
d'information. Leur utilisation s'impose au cours du conflit à
des fins de propagande, pour entretenir la mobilisation des civils,
notamment lors des grands emprunts pour la défense
nationale.

Les
tracts quant à eux sont devenus l'outil par excellence de la
propagande de masse. Les autorités militaires assurant leur
rédaction et leur diffusion, les tracts innondent le front et
l'arrière, notamment grâce aux avions et aux projectiles
lance-tracts qui répandent vérités et
contre-vérités.
Voici
enfin une nouvelle, passant de journaux en journaux, donnant un
résultat assez édifiant (cité par Jean Galtier
Boissière - La Grande Guerre):
Lorsqu'on connut la chute d'Anvers, on sonna les cloches - Koelnische Zeitung
D'aprés
la "Koelnische Zeitung", le clergé d'Anvers fut invité
à faire sonner les cloches des églises lorsque fut prise
la forteresse - Le Matin
D'aprés
ce que "Le Matin" a appris de Cologne, les prétres belges, qui
refusèrent de sonner les cloches lorsqu'Anvers fut prise, ont
été révoqués - The Times
D'aprés
ce que "Le Times" a appris de Cologne, via Paris, les infortunés
prétres belges, qui refusèrent de sonner les cloches des
églises lorsqu'Anvers fut prise, ont été
condamnés aux travaux forcés à
perpétuité - Corriere Della Serra
D'aprés
une information du "Corriere Della Serra", de Cologne, via Londres, on
confirme que les conquérants barbares d'Anvers ont puni les
infortunés prétres belges, qui avaient
héroïquement refusé de sonner les cloches, en les
accrochant comme des battants vivants dans les cloches, la tête
en bas - Le Matin
Actualités filmées:
Les bandes d'actualités apparaissent sur les écrans
français en 1908, et en 1914 elles occupent déjà
une place substantielle dans tous les cinémas. En 1915, sous
l'impulsion des industriels du cinéma, l'armée
crée une Section Cinématographique de l'Armée
(SCA), dont le rôle est notamment la propagande tant en France
qu'à l'étranger. Les premiers temps on ne filme pas sur
la ligne de feu, pour des raisons techniques et de
sécurité. On voit seulement des explosions au loin. C'est
lors de la bataille de la somme que pour la première fois des
opérateurs intégrés aux unités combattantes
réussisent à filmer un véritable assaut. La grande
guerre devient ainsi une des premières à être
filmée!